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Blog Economie
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15.02.2008
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BUDGET DU CAMEROUN: l’année 2011 sera très difficile (Interview réalisé par le journal le Messager-

BUDGET DU CAMEROUN: l’année 2011 sera très difficile (Interview réalisé par le journal le Messager-

Publié le 11/01/2011 à 18:48 par analysis

Dieudonné ESSOMBA est Ingénieur Principal de la Statistique, cadre au Ministère de l’Economie, de la Planification et de l’Aménagement du Territoire. Il a commis aux éditions du Centre d’Analyses Economiques et Sociales (CAES) un ouvrage intitulée « Une solution pour le développement de l’Afrique : la Monnaie Binaire ». Dans ce livre, l’auteur soutient que l’organisation actuelle du monde, fondée sur la libre circulation des biens et des capitaux et les migrations contrôlées des populations, entraîne une polarisation rigide des économies, avec deux principales conséquences : d’une part, l’impossibilité pour l’Afrique de se développer, d’autre part, l’impossibilité que l’Europe et la Chine soient développées au même moment. L’une doit donc rejoindre l’Afrique dans son sous-développement.
Pour sortir de cette impasse, l’auteur propose la monnaie binaire qui découple chaque économie en deux réseaux commerciaux basés sur deux monnaies, une monnaie locale inconvertible, et une monnaie internationale.
Nous l’avons approché pour nous donner son sentiment sur le projet de loi des Finances 2011 du Cameroun.


Question 1 : Quelles sont les clés pour comprendre le projet de loi des finances 2011 ?

D. ESSOMBA : Avant de répondre à votre question, je dois signaler que mes positions renvoient exclusivement à mes livres et mes articles de recherche et n’ont aucun rapport avec le MINEPAT dont je reste l’un des cadres. A cet effet, je voudrais préciser que l’obligation de réserve à laquelle est soumis tout fonctionnaire aurait voulu que ces positions soient débattues à l’intérieur de l’administration. Malheureusement, la crise économique déclenchée en 1987 et la suspension des plans quinquennaux ont entraîné l’effondrement de notre dispositif institutionnel de débats économiques, constitué notamment des anciennes commissions de planification. Il en a découlé l’acceptation inconsidérée de la pensée des partenaires au développement et l’apparition d’une classe d’économistes administratifs spécialisés dans le bavardage et l’explication sommaire, avec pour conséquence des échecs récurrents de nos politiques économiques ; mais aussi et surtout, le dédouanement à bon compte des mauvais choix stratégiques que nous imposent nos partenaires, à travers l’argument tout terrain de notre mauvaise gouvernance.
Le Chef de l’Etat a certainement perçu cette dérive en créant, à travers le décret portant organisation du Ministère de l’Economie, une Direction Générale de l’Economie, dont l’une des missions majeures est d’être une puissante force de propositions, et un centre de résolution et de consolidation des options différentes de développement. Il faut à cet effet signaler qu’il n’existe pas d’algorithme connu à appliquer pour développer le Cameroun. C’est d’abord et avant tout une œuvre permanente de recherche, basée sur le débat, la simulation, l’exploration de toutes les idées. Ce n’est qu’à partir de ce travail, avec la mobilisation de toutes les compétences nationales que pourra se dégager le sentier de développement si recherché.
La confiance exagérée portée sur le FMI et la Banque mondiale dans nos politiques de développement est donc peu pertinente, et l’on peut bien s’en convaincre lorsqu’on voit comment ces institutions suscitent, auprès des pays Européens en crise, la même répulsion qu’inspirent les serpents venimeux.
La voie du développement du Cameroun n’est donc pas donnée.
C’est fort de cette conviction et à défaut de débattre en profondeur mes idées dans un cadre plus conventionnel qu’il m’a paru nécessaire d’apporter ma contribution par voie de publications d’ouvrages et d’articles ; et présenter une perception relativement différente des autres...
S’agissant maintenant de la compréhension du projet de loi de Finances de l’année 2011, il faut dire que l’Atteinte du Point d’Achèvement de l’Initiative PPTE en 2006, qui s’est traduite par une remise substantielle de la dette multilatérale, a fait apparaître les signes d’un nouveau départ pour le Cameroun. L’ambiance d’optimisme développée par cet événement a conduit le Gouvernement à renouer avec une approche de développement fondée sur le long terme, en confectionnant une Vision d’un Cameroun émergent en 2035, ainsi qu’un Document de Stratégie pour la Croissance et l’Emploi (DSCE), nettement plus ambitieux que l’ancien Document Stratégique pour la Réduction de la Pauvreté (DSRP) qu’il remplaçait. On comprend que les pouvoirs publics aient été tentés de traduire cette ambition dans les Budgets qui ont ainsi connu une évolution progressive. Ainsi, le budget de 2010 a connu, par rapport à celui de 2009, une augmentation nominale de 268,6 milliards de FCFA, soit une évolution de 11,7%.
Comme on le voit cette évolution est nettement plus élevée que le PIB qui plafonne à 3%, une valeur à peine supérieure à sa valeur végétative de 2,6% qui correspond à la croissance démographique.
Le Budget 2011, qui ne connaît qu’une évolution symbolique de 1 milliard par rapport à celui de 2010, apparaît ainsi comme une rupture, qu’on peut certes relier, à l’instar du Gouvernement, à la situation économique mondiale, mais qu’on peut aussi interpréter comme la prise de conscience que les capacités du système productif à générer un tel Budget avaient été malencontreusement surestimées.
Mais au-delà de ces explications, il est loisible de constater que le Budget de 2010 encore en cours ne fait que dévoiler sous une forme paroxysmique un grand nombre de problèmes qui se dessinaient déjà au cours des années passées : notre Budget fonctionne sur la base des quotas qui, dans un premier temps, avaient été conçus pour empêcher une thrombose dans les décaissements. Mais au fil du temps, ces quotas se sont progressivement mués en un instrument de régulation pour limiter la dépense publique, voire l’affecter préférentiellement à des dépenses ciblées, en complète négation de la loi des Finances.
Cette instrumentalisation des quotas en régulateur budgétaire a aussitôt généré quatre effets pervers. Le premier effet tient au principe de prévision : le Budget est voté en tenant compte des priorités et des synergies dans chaque secteur ; mais le rationnement intrinsèquement arbitraire des autorités financières vient imposer un biais qui altère l’efficacité de la dépense. Le second est une pulsion obligatoire des gestionnaires de crédits à privilégier les opérations mobilisant facilement les ressources, et à développer un esprit de tractation avec les circuits financiers de l’Etat dont la porosité s’en trouve amplifiée. Le troisième est la déstabilisation de l’action publique à laquelle ces discontinuités imposent un rythme décousu qui érode l’enthousiasme des agents publics et réduit leur performance. Le dernier enfin est la tendance à la coagulation des crédits dans les cabinets ministériels, ce qui a pour effet d’empiler aux missions stratégiques des Ministres, des tâches opérationnelles de niveau très bas, entraînant une surcharge de leur travail.
De tels effets ne peuvent que dévoyer les objectifs du Budget et il y a lieu de douter que celui-ci ait rempli convenablement son rôle d’instrument majeur de la politique économique au cours des quatre dernières années.
Mais assez bizarrement, cette tension permanente de trésorerie apparaît en contradiction avec la sous-consommation des crédits d’investissement, décriée par le Chef de l’Etat lui-même. Comment comprendre qu’un pays soumis à tant de difficultés, avec des camerounais dont on connaît l’empressement à réaliser les dépenses, puissent rester incapables d’utiliser les faibles ressources mises à leur disposition ? Malgré les études, les analyses, les séminaires sur la gouvernance, cette maladie reste non résolue.
C’est dire que le Budget du Cameroun est affecté d’un grand nombre de paradoxes qui le rendent peu lisible et peu compréhensible pour le profane.

Question N°2 : Pensez-vous que c’est un Budget réaliste ?

D. ESSOMBA : Les difficultés recensées dans mon propos précédent peuvent laisser penser que le Budget est irréaliste et cette explication a d’ailleurs la faveur d’une partie de Camerounais. Néanmoins, l’observation des autres pays ne confirme pas ce point de vue : en 2008, les dépenses publiques représentaient 44,3% du PIB en Allemagne, 53,8 % en Suède, 53,4 % en France. Vous me direz qu’il s’agit là des pays très développés, mais sachez que dans la zone CFA, le Cameroun dispose, avec 20% du PIB, de l’une des dépenses publiques les plus faibles. De ce point de vue, le Budget camerounais ne saurait être considéré comme exagéré et irréaliste.
Le problème de ce Budget ne se situe donc pas dans de mauvaises prévisions, la mauvaise gouvernance ou les défaillances opératoires de l’appareil fiscal, mais dans un phénomène d’économie fondamentale connu sous le nom de « verrou de la contrepartie extérieure ».
Pour mieux appréhender ce phénomène, il faut d’abord noter que le nécessaire équilibre de la balance des paiements découple toute économie en deux réseaux commerciaux. Le premier réseau, dit réseau intérieur, regroupe les activités s’opérant sur le territoire national et n’ayant aucune vocation à l’exportation. Le second réseau, dit réseau extérieur, est composé des exportations, des recettes touristiques, des dons et des transferts de la Diaspora, pour les flux d’entrée, et des importations pour les flux de sortie.
Les deux réseaux sont articulés, mais strictement étanches. En effet, comme le commerce international n’est en définitive qu’une forme sophistiquée de troc, on ne peut acheter à l’étranger qu’en proportion de ce qu’on peut y vendre. Par suite, les revenus issus des produits et services locaux qui ne sont pas exportables ne peuvent être convertis en devises et n’ont aucun intérêt pour le réseau extérieur. Aussi important soit-il, le revenu tiré de telles activités qui représente un pouvoir d’achat uniquement local ne peut permettre d’acheter la moindre voiture du Japon.
La difficulté de distinguer les deux réseaux vient du fait que sur le territoire national, ils utilisent la même monnaie, ce qui permet à tout le monde d’avoir accès aux devises même lorsqu’on produit pour le marché local. Mais il s’agit là d’une simple redistribution des devises disponibles et non la création de nouvelles.
Or, l’impossibilité de transformer le pouvoir d’achat local en devise a un impact négatif sur la réalisation du Budget. Ainsi, le Budget camerounais de 2010 a été équilibré en recettes et en dépenses à 2570 Milliards. Comme ce Budget représente 25% du PIB, il contient également 25% des 2000 Milliards de devises produites par le Cameroun à travers ses recettes extérieures. Le Budget du Cameroun contient donc 500 Milliards de FCFA en devises.
Si les dépenses budgétaires du Cameroun n’entraînaient que ces 500 Milliards de dépenses en devises, notre Budget n’aurait aucun problème. Malheureusement, la simple observation dégage une tendance à l’amplification des achats extérieurs de notre Budget. Outre le paiement de la dette extérieure qui est une contrainte, l’amplification de la dépense à l’étranger est parfois volontaire, lorsque les responsables achètent des limousines, remplacent les équipements à tout bout de champ ou multiplient des missions à l’étranger. Elle peut être également mue par un réel désir de développer le pays, notamment quand le Gouvernement tente d’augmenter le taux d’investissement pour doper la croissance ; comme le pays est technologiquement dépendant, cet investissement se traduit par de fortes importations d’équipements et des machines. Enfin, elle vient de la modification du profil de consommation des agents publics dont le niveau moyen s’élève d’année en année, et on sait que le niveau intellectuel entraîne une tendance à l’achat des biens étrangers. Une évaluation montre que le contenu en devises des dépenses budgétaires s’établit à 900 Milliards par an, nettement supérieurs aux 500 milliards de devises contenus dans les recettes. Soit un gap de 400 milliards, difficile voire impossible à combler.
Pour un pays qui sort de l’endettement et ne veut plus y plonger, ce grave déficit en devises du Budget entraîne des conséquences redoutables : il génère une détérioration rapide du solde extérieur du pays, et par ricochet, les risques d’un brutal réendettement. D’où l’obligation de freiner les engagements.
Le frein peut prendre la forme volontaire des quotas. Dans ce cas, l’autorité financière réduit le rythme des décaissements et le pays se retrouve avec un grand excédent budgétaire, mais une grave sous-consommation des crédits d’investissement. Dans ces économies très faibles et aux besoins si immenses, une telle liquidité oiseuse crée la stupéfaction et faute d’en comprendre la cause, on l’imputera à la mauvaise gouvernance. Dans la réalité, cette masse d’argent ne correspond qu’à des productions impossibles à exporter et n’a aucune valeur dans la capacité du pays à acheter en devises. En d’autres termes, les devises initialement contenues dans la monnaie nationale ont déjà été utilisées, et ce stock de monnaie restante ne correspond plus qu’à un pouvoir d’achat local sans valeur hors des frontières. Ainsi contraint, l’Etat limitera son action aux segments scripturaires et cérémoniaux de la chaîne d’investissement, à savoir les études, les ateliers de validation, les séminaires et les poses de première pierre, qu’on peut facilement réaliser sans faire appel aux importations. Mais les réalisations physiques resteront rares.
La seconde forme que prendront ces discontinuités est la superposition d’une surliquidité des banques à une sous-liquidité de l’économie et des graves tensions de la trésorerie de l’Etat. Cette situation apparaîtra dès que les pouvoirs publics tentent à tout prix de réaliser le Budget d’investissement, nonobstant le déficit en devises, la faible marge de manœuvre et le risque de réendettement. Pour en comprendre le mécanisme subtil, il faut noter que dans les échanges internationaux, les transactions se passent à travers les crédits documentaires irrévocables : un producteur japonais n’envoie sa marchandise à un commerçant camerounais que si une banque camerounaise s’engage à en transférer la valeur en yens (et non en CFA !) à une banque japonaise. Cet engagement peut être révocable, auquel cas la banque camerounaise ne paye que si le commerçant camerounais a effectivement déposé la valeur de la marchandise dans ses comptes. Dans ce cas, elle ne joue qu’un rôle d’intermédiation.
Mais l’engagement peut aussi être irrévocable, auquel cas la banque camerounaise est tenue de rembourser même si le commerçant camerounais est défaillant. Or, quand la situation extérieure du pays se dégrade, la banque camerounaise prend vite conscience qu’elle ne peut plus fournir les devises requises par le Japon et refuse de prendre des engagements irrévocables en l’absence d’une provision. Les opérateurs qui ne disposent pas de très importantes liquidités gèlent leurs activités et conservent leur argent dans les banques, entraînant de ce fait une dépression immédiate de l’activité économique. Le Budget qui y est fortement lié se réduit dans les mêmes proportions et les prévisions budgétaires sont faussées.

Comme vous pouvez le voir, le problème du Budget du Cameroun ne se situe pas dans son volume qui reste plutôt faible, mais dans sa structure complètement tordue. Les recettes dégagent un fort contenu en pouvoir d’achat local et un faible contenu en pouvoir d’achat extérieur, alors que les dépenses font exactement l’inverse.
Ce problème majeur rend impossible la réalisation de ce Budget. Comme le problème ne suscite guère de mobilisation, si on excepte les appels désespérés et solitaires au renforcement de notre situation extérieure lancés par le Ministre des Finances, on peut être certain que les problèmes identifiés vont s’amplifier au cours de l’année 2011 qui sera particulièrement dure. En fait, les projets resteront toujours au niveau des effets d’annonce et des ateliers de validation, la croissance restera plombée à son niveau végétatif, la pratique des quotas sera amplifiée, les suspensions d’engagements seront plus récurrentes ; et le Gouvernement devra fournir des efforts surhumains pour maintenir les salaires, sans garantie de succès. L’année 2011 sera très, très difficile au Cameroun…

Question N°3 : Quelle est la démarche à adopter pour que le Cameroun ait un Budget réaliste ?

D. ESSOMBA : Je ne dirais pas réaliste mais, régulièrement réalisable. Le problème du Budget du Cameroun n’est pas dans son volume, mais dans une surdose des dépenses en devises. La condition impérative est d’ajuster le contenu en devises des dépenses au contenu en devises des recettes. De manière plus concrète, il s’agit d’une part de confectionner un abaque budgétaire, c’est-à-dire, un instrument qui présente le contenu en devises de chaque rubrique budgétaire. L’abaque permet d’indiquer le montant en devises qu’entraîne telle ou telle dépense. Par exemple et à titre d’illustration, lorsqu’on engage 100 FCFA de dépense :
- pour une mission à l’intérieur, on dépense 30 FCFA en devises ;
- pour une mission à l’extérieur, on dépense 90 FCFA en devises ;
- pour un kilomètre de route bitumée, on dépense 45 FCFA en devises.
D’autre part, au moment où on arrête le Budget d’un Ministère, on devrait lui imposer en même temps un plafond en devises dans ses dépenses. A titre d’exemple, un Ministère dont le Budget est de 10 Milliards de FCFA devra non seulement respecter ce Budget (caractère limitatif des crédits budgétaires), mais aussi respecter un plafond de 2 Milliards de FCFA en devises destinées aux achats de biens et services à l’extérieur.
En l’absence d’un immense gisement de pétrole ou d’or qu’on trouverait à l’heure actuelle, seule une telle mesure est capable de stabiliser le Budget du Cameroun et le ramener à une gestion plus conventionnelle. Son avantage est qu’elle amène les Ministres à limiter eux-mêmes les dépenses extérieures comme l’achat des voitures et les missions à l’étranger, au risque d’épuiser trop rapidement leurs allocations en devises. Mais plus important encore, une telle démarche transfère la compétitivité du coût global d’une transaction vers son coût en devises : par exemple, un bâtiment en matériaux locaux peut avoir un coût global plus élevé qu’un bâtiment aux matériaux importés, mais dès lors qu’il est moins coûteux en devises, il devient immédiatement plus compétitif. Ce sera la meilleure manière de réactiver les activités locales plombées par notre mauvaise articulation à l’économie internationale.

Le Messager : Pensez-vous que l’économie peut être compétitive à partir de la loi des finances 2011?

D. ESSOMBA : La compétitivité est la capacité de battre les concurrents dans un domaine donné. Sur le plan économique, elle dépend non seulement du niveau d’industrialisation du pays, de la taille de son marché intérieur, de la qualité de ses hommes et de sa gouvernance, mais aussi et surtout, des jeux stratégiques internationaux. Les récriminations actuelles de l’Occident contre la Chine, accusée à tort ou à raison de doper sa compétitivité par la monnaie, montrent bien qu’il s’agit d’un concept martial qui renvoie aux batailles hégémoniques et à une posture de domination.
Mais à l’évidence, la situation actuelle du Cameroun ne lui permet pas de se mêler de ces combats de titans. Il serait donc, à mon sens, plus judicieux de parler de productivité. Les Camerounais n’ont pas besoin de battre un concurrent pour bien se nourrir ou bien se loger ; ils ont juste besoin de produire mieux et c’est à cela que peut servir notre Budget. Maintenant, le budget actuel peut-il améliorer la productivité du Cameroun ? Il faudrait, pour y répondre, le soumettre à une analyse anatomique et structurelle, en vérifiant notamment la condition minimale qui est son équilibre en devises, mais aussi, la répartition fonctionnelle des dépenses, afin d’en dégager les impacts prévisionnels. Quand on élabore un budget, il faut tenir compte des relations organiques entre les divers secteurs, de la répartition du travail entre l’Etat, le secteur privé, la société civile et les ménages, mais surtout, il faut anticiper sur les capacités de réponse des uns et des autres. Quand l’Etat envisage électrifier une zone, il doit s’assurer que cette électricité ne sera pas seulement utilisée à des fins de consommation, mais aussi qu’elle entraînera l’apparition des activités productives. C’est un travail ardu qui montre que le budget n’est pas seulement une loi ou un document politique, mais aussi un document scientifique qui mobilise des équipes d’experts et des instruments d’aide à la décision hautement élaborés.
Mais en attendant la configuration définitive de ce budget telle qu’elle sera votée par la Représentation Nationale, on peut d’ores et déjà affirmer que son impact sera limité, en raison même de son orientation idéologique. Ce budget aurait du être élaboré, non dans une optique de compétitivité, mais dans le cadre d’une stratégie d’évitement, qui est plus sage et plus adaptée à notre économie encore jeune et fragile. Le premier axe d’une telle stratégie est la spécialisation dans quelques secteurs, dans lesquels on dispose d’un avantage comparatif. Le second porte sur le développement des technologies alternatives qui utilisent des techniques adaptées à l’environnement technique et humain, à l’instar des approches HIMO. Le troisième consiste à se spécialiser dans les segments de marché peu intéressants pour les producteurs dominants. Ce qui est le cas des voitures peu élaborées, mais très bon marché, fabriquées en Inde.
Le quatrième axe porte sur l’instauration d’un Système d’Echange Local (SEL), qui réalise une séparation entre le pouvoir d’achat extérieur et le pouvoir d’achat intérieur, de manière à ce que le premier n’écrase plus le second comme cela se passe aujourd’hui. Par exemple, si on choisit des billets bleus pour le FCFA local et les billets jaunes pour le FCFA international, un client saura qu’un costume importé coûte 10 billets jaunes, un costume entièrement local 10 billets bleus et un costume cousu localement avec des étoffes importées coûte 6 billets bleus et 4 billets jaunes. Cette structure binaire de l’économie permet ainsi aux costumes locaux de prospérer, car n’entrant plus en concurrence avec son analogue importé.
Un système proche fonctionne en Suisse depuis 1934 où cohabitent de manière binaire le Franc Suisse et le WIR, et dans la ville américaine d’Ithaca qui fonctionne avec le dollar et les Hours depuis 1987. Ces systèmes furent conçus pour combattre le chômage et les délocalisations, mais on peut prouver qu’ils constituent également la solution au sous-développement de l’Afrique. Avec un tel système, le Cameroun devient immédiatement capable de stabiliser son système économique, de couper le cordon ombilical avec le FMI et la Banque Mondiale et surtout, d’atteindre spontanément un taux de croissance de 8% qu’on pourrait maintenir pendant 25 ans.
Ce n’est qu’avec une telle rupture que le Budget camerounais pourrait pleinement jouer son véritable rôle d’instrument économique. Pour nous, il est difficile d’envisager les choses autrement.

Bibliographie : « Une solution au sous-développement : la Monnaie Binaire », en vente aux Editions Clé.

:: Les commentaires des internautes ::

Christophe wambo le 26/10/2011
article assez interessant, mais pour moi le vrai pb c'est cette dependance vis à vis des pays occidentaux dit developpes qui n'ont aucun interet a nous voir un jour developpé a moins que comme les pays emergents, nous nous appuyons sur un enorme marché interieur et biensur la contrefacon et la contrebande....


alex le 08/12/2011
POURQUOI EST CE QUE L'etat CAMEROUNAIS PERMET AUX MINISTRES ET A CERTAIN HAUT CADRE DE GARDER L'ARGENT EN EUROPE.L'OPERATION EPERVIER A RAMASSER MAIS OU EST DONC L'ARGENT KIL AVAIENT VOLé POUR KE LE BUDGET DU PAYS SOIT TJRS EN BAISSE SVP METTEZ CET ARGENT A LA DISPOSITION DES MINISTèRES AFIN KE LES JEUNES SOIENT EMPLOIYé SVP PENSez a la jeunesse de ce pays